Tout commence suite à la crise des missiles à Cuba. Les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l'URSS signent à Moscou le 05 août 1963 le traité d'interdiction partielle des essais nucléaires, c'est-à-dire dans l'atmosphère, dans l'espace et sous l'eau. Peu après son entrée en vigueur le 10 octobre de la même année, les Etats-Unis envoient des satellites espions, les sondes Vela, destinés à surveiller l'application de ce traité dans l'espace. Il se trouve que les explosions nucléaires ont une signature dans le rayonnement gamma et c'est ainsi qu'en 1967 les Etats-Unis observent une incroyable bouffée gamma, la première. D'autres sondes sont envoyées jusqu'en 1970 et affinent l'hypothèse d'une provenance cosmique plutôt que celle d'un essai nucléaire. En 1973, les données couvertes par le secret militaire sont déclassifiées au profit de la communauté scientifique, dans un article du 1er juin 1973 de l'Astrophysical Journal qui fait pour la première fois mention d'un sursaut gamma, sous l'appellation GRB (Gamma Ray Burst).
De l'observation dans les gamma et dans les X
En 1991, l'observatoire gamma Compton de la Nasa prend le relai avec l'expérience Batse (Burst And Transient Experiment). Jusqu'à 2000, la mission qui opère dans une large bande du spectre électromagnétique (de 20 keV à 1000 MeV) va détecter jusqu'à 2407 sursauts gamma. Les astrophysiciens vont ainsi dresser une carte avec des coordonnées galactiques qui va conduire à une découverte : les sursauts gamma proviennent de tout le ciel et pas que de notre galaxie. Les chercheurs observent également que certains sursauts sont très courts (inférieurs à une seconde) et d'autres longs (de l'ordre de la minute).
Parallèlement, l'observatoire de l'agence spatiale italienne BeppoSax fait progresser de manière très importante la compréhension des sursauts gamma. Sa principale caractéristique est la largeur du spectre électromagnétique dans lequel ses instruments observent : des rayons X mous (0,1 keV) jusqu'aux rayons gamma (300 keV). En 1997, la mission observe pour la première fois une émission rémanente de sursaut gamma, baptisé GRB971214, dans le rayonnement X. Son énergie est telle que la lumière de cette émission rémanente a voyagé pendant 11,7 milliards d'années (sur les 13,9 milliards de l'âge de l'Univers).
La révolution du masque codé pour mieux localiser les sources gamma
Dans les années 2000, forte de connaissances et de nouvelles questions qui s'accumulent, la communauté est convaincue qu'il faut pouvoir détecter les sursauts gamma dans toutes les longueurs d'onde, du fait de leur émission rémanente dans les rayonnements X et visible, et de mieux localiser les sources gamma dans une très large portion du ciel. Or, il est impossible d'appliquer les principes de focalisation optique (lentilles, miroirs) à l'observation des rayons X durs et gamma sur des grands champs de vue. C'est là qu'apparaît le principe du masque codé, une technologie bien maîtrisée en France et au CEA-Irfu qui a été le premier à la mettre en œuvre dans la mission spatiale russe Granat pour le télescope Sigma de 1989 à 1997.
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C'est donc cette technologie qui est choisie pour l'observatoire Neil Gehrels de la mission Swift de la Nasa qui observe dans les UV, les X et les gamma. Lancée en 2004, elle détecte jusqu'à 1000 sursauts gamma et confirme l'hypothèse de l'expérience Batse des deux familles de sursauts. La communauté tend à présent à identifier les sursauts courts à la fusion d'objets compacts (étoiles à neutrons, trous noirs) et les sursauts longs à l'effondrement d'étoiles massives. Le 04 septembre 2009, Swift détecte un sursaut gamma très puissant, très brillant mais dont la lumière diminue très rapidement dans le temps. Grâce au système d'alerte, ce GRB050904 est localisé par d'autres satellites spatiaux et télescopes au sol et daté lorsque l'Univers était âgé de 886 millions d'années. En 2009, un deuxième objet aussi lumineux est localisé à 625 millions d'années.
De nouvelles générations de télescopes
Il apparaît que les sursauts gamma permettent d'étudier l'Univers lorsqu'il était très jeune mais de nombreux mystères demeurent. De fait, des télescopes de nouvelle génération deviennent indispensables pour atteindre trois objectifs :
- Détecter l'émission très furtive des sursauts gamma dans le rayonnement X ;
- Opérer un suivi multi-longueurs d'ondes coordonné le plus rapidement possible du rayonnement X à l'infrarouge ;
- Dérouter le plus rapidement possible les grands télescopes terrestres lors de la détection spatiale d'évènements exceptionnels.
C'est tout l'enjeu de la mission Svom qui débute et à laquelle participe très activement le CEA-Irfu.